11h, 11h15, 11h30, 11h45… mais pourquoi est-ce si long ? Je vois bien qu’ils n’en n’ont rien à faire de moi. Ils passent maintenant à côté de moi sans même me regarder. Je ne suis pourtant pas un fantôme, j’existe, je suis là !!

Quand on est au bord de l’épuisement, quand on a les yeux qui brillent et que l’on respire par la bouche avec des râles de supplicié, quand on est à l’article de la mort, la moindre des choses c’est de m’ausculter, de m’examiner sur le champ, et surtout le moindre des mots à ne pas avoir est bien de me demander si ça va pour ensuite partir ailleurs, parce que non, ça ne va pas, pas du tout ! Bon sang de bon sang, on ne demande pas à un homme qui a le bras déboité et l’os qui sort de l’avant-bras après avoir un peu trop forcé pour ouvrir une huitre si ça va bien, on ne demande pas à un homme qui crache du sang par les oreilles après avoir écouté du Christophe Mae si ça va, on ne s’informe pas de la santé mentale de quelqu’un qui va voir un épisode de Twilight, alors on ne demande pas non plus à quelqu’un qui émet des volutes de chaleur comme l’horizon d’une route de campagne de l’Hérault en plein été, si ça va. Ce n’est pas le cas, ce n’est jamais le cas.

Et lui là, en face de moi, pourquoi me dévisage-il ainsi ? Je ne suis pas parano mais ça fait bien une heure qu’il me fixe sans avoir détourner le regard avec ses yeux injectés de sang, brillants comme Venus au lever du jour, la bave aux lèvres. Il est affalé sur cette banquette avec l’élégance d’un sac militaire dans une camionnette. Plus je le regarde et plus je distingue en lui une espèce d’ersatz humain échappé du moyen-âge ou d’un quelconque pays du tiers monde où le typhus et le choléra étaient aussi courants que le rhume des foins chez un asthmatique couché dans un grand champs de blé en plein été. Il va me refiler son affaire, c’est sure.

Ah enfin on vient, on me conduit dans une petite salle séparée par un simple rideau. Quoi comment ça un rideau, et c’est avec ça qu’ils pensent que les microbes vont s’arrêter d’une salle à une autre ? Il s’approche, me scrute des pieds à la tête et commence à me parler. Il rigole, il se moque de moi en plus ?! Inutile de lui dire que je n’ai vraiment pas d’humour surtout quand on parle de ma maladie. Et le plus compatissant des hommes ne saurait d’ailleurs faire preuve d’assez d’angélisme face au déchainement de rage et d’irritabilité qui monte de plus en plus dans ma chair.

–        C’est un coup de soleil, monsieur, rien d’autre !!

–        Hein, Quoi, Non c’est un cancer, je le vois bien ça se détériore, là sur la peau, regarder mieux !! là mais regarder, regarder !!!

Et c’est alors qu’il tourna les talons, me laissant seul, seul avec mon regard livide, avec mon angoisse et ma maladie sans symptôme qui me ronge chaque jour un peu plus. Je suis hypocondriaque et ça ne se voit pas toujours.

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