« Que ça cesse »

Ça me prend là, dans la poitrine, ça m’oppresse, je suis seul, il est tard, ça me serre, je ne sais pas ce qui se passe, cette douleur lancinante, c’est l’angoisse ou le cœur, je ne sais pas, et j’ai peur, une barre, ça cogne, je me lève, me sers un verre d’eau, ça continue, trouver le téléphone, je ne sais pas où il est, ah ça y est je vois le portable, merde, c’est vrai la batterie est vide, où ai je mis le téléphone fixe,  ça tire quand je marche, où il est ce putain de téléphone,  je commence à paniquer et ça presse et ça m’oppresse de plus en plus,  j’ai envie de crier mais je n’ose pas, il est 3h du matin, appeler le SAMU, mais comment faire, je ne trouve pas le téléphone, alerter les voisins, non, ça ne se fait pas à 3h du matin, si ça se fait, non, je ne sais pas, ça tire, ça tire et ça tire,  je n’arrive plus à marcher, je vacille, tombe à terre, et ça presse et ça tire et ça presse de plus en plus fort,  je veux juste que ça s’arrête, n’ai plus peur de partir  mais que  ça cesse, c’est la seule chose, que ça cesse, que ça cesse, que ça cesse…

                                                                *

« Nocturne 4 »  par François Minod

La nuit est noire comme il se doit, les monstres attendent que les enfants dorment, ils s’échauffent dans leurs arrière-boutiques. Jusque-là, rien à dire, tout est à sa place, on n’attend plus que le signal pour commencer.

Oui, mais voilà, les enfants ne veulent plus jouer à avoir peur de ces monstres qu’ils ne voient que la nuit, et les monstres ne veulent plus travailler la nuit pour des salaires à peine plus élevés que le jour. Que faire ? Après d’âpres négociations avec les uns et les autres, il fut décidé de couper la poire en deux : les monstres feraient leur prestation pour moitié la nuit et pour moitié le jour, en appliquant le tarif de nuit, jour et nuit.

Les monstres avaient gagné la partie en ce qui concerne les tarifs.

En ce qui concerne les enfants, c’est une autre affaire. Visiblement déçus par leur prestation diurne, ils se désintéressèrent progressivement des monstres, estimant qu’ils ne leur faisaient plus peur, surtout le jour. C’est souvent comme ça avec les choses de la nuit qu’on veut transférer le jour, c’est peut-être dû à des phénomènes de surexposition, allez savoir !

                                                              ***

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