– Parlez-moi de vous
– De moi en général?
– Non, de vous en particulier
– Mais, c’est intime.
– Justement.
– Je ne peux pas en parler.
– Ah et pourquoi ça?
– Parce que ça ne sera plus intime,si j’en parle.
– Disons que ce sera une intimité exprimée.
– Une extimité?
– Si vous voulez, oui.
– Il faut que je réfléchisse.
– C’est vous qui voyez.
Un temps
– Si je l’exprime, vous me la rendrez?
– Bien sûr, qu’est-ce que vous voulez que j’en fasse?
Un temps
– je vous remercie beaucoup docteur.
– Il n’y a pas de quoi.
– Mais au fait, au sujet de l’intimité, je n’ai rien dit encore.
– Si, si, beaucoup plus que vous ne le croyez.
– Ah bon.
– Oui, le processus est enclenché.
– Mais je n’ai rien dit d’intime.
– Apparemment, non, mais en fait, vous avez dit beaucoup.
– Ça, alors. Expliquez-moi.
– Votre façon de résister au dire de l’intime est déjà l’expression de votre intimité.
– Vous voulez dire que ma crainte de dévoiler mon intime…
– … Est une manifestation de votre intimité, oui.
– Ça alors, vous êtes fort docteur. Mais comment faire pour qu’elle ne se voit pas?
– Ne plus venir.
– Ah oui, je n’y avais pas songé.
Un temps
– Je vous téléphonerai.
– C’est vous qui voyez.
– À bientôt.
– C’est vous qui voyez.
– Oui, c’est moi qui vois et vous aussi d’ailleurs.
– On en restera là pour aujourd’hui. Au revoir.
Ils se serrent la main, la porte se referme
Un temps
– On ne peut rien leur cacher. Et pourtant, c’est pas faute d’avoir essayé.