Lou est née le 14 février 2018, quand la dernière session du buffet littéraire allait commencer.
J’y renonçais pour faire sa connaissance, et m’engouffrais dans le premier avion.
Quelques jours avant je décidais d’écrire pour elle l’histoire de la famille, la mienne, il y aurait du Caire, de l’Hesdin, du Marseille, de l’Alger, du Livourne, peu d’Antibes ou de Nice, Paris, en contre point.
Quelques pages après, elle naissait, l’ouvrage est resté en suspens,
Puis je le reprendre ce soir avec ce buffet littéraire qui suit ?
L’éveil en est le thème, je le savais depuis peu et je renonçais à nouveau … cette fois, à une marche blanche, pour m’arrêter sur le sujet avec ma plume plutôt qu’à Nation, pour défiler, à côté des miens, comme jadis je le fis à NICE avec l’attentat de la rue Copernic, quand des Français innocents sortaient de leur endormissement, l’éveil sonnait.
Je retrouvais dans la foule un juge, un bon juge, le juge MINOD empli de colère et d’incompréhension. Nous marchâmes dans la complicité de ceux qui s’aiment et qui n’ont nul doute sur la réciprocité de l’affection.
Cet après-midi-là nous saisissions que si les nazis et leurs disciples avaient endormi le monde ordinaire par la violence et le culte de la lâcheté, l’éveil qui en est résulté lors de la Libération n’était que spectaculaire et faussement radical, les consciences s’étaient endormies.
Plus tard mai 68 ne fut qu’une émergence inconsciente d’un passé refoulé dans une ambiance autoritaire à la papa, dont les enfants voulaient se débarrasser en lançant des pavés, avant de rentrer dans un monde convenu où le mot éveil ne se prononce par les jeunes parents assagis que dans les magasins de jeux pour bébés que l’on doit éveiller à coup de PLAYMOBIL, dont la première série venait de naitre à NUREMBERG
Les autres étaient les paumés du petit matin qui chantent Paris s’éveille , les plus riches se meublent en KNOLL, la marque est à la mode, elle vient d’Amérique, son créateur ,lui, de STUTTGART.
Aujourd’hui, quelques voix tentent de réveiller les consciences, en rappelant l’histoire de ces villes et la veulerie des autorités au pouvoir dont le seul intérêt est la productivité du grand commerce, comme ce fut déjà le cas de ces membres de l’Assemblée convoquée à VIENNE à l’approche des pas de l’oie, si bien décrits par Eric VUILLARD dans « l’ordre du jour « ( prix Goncourt 2017)
Ces élus, grands industriels, cultivaient le sommeil des esprits à passer « leur matinée à bucher, plongés dans ce grand mensonge décent du travail, avec ces petits gestes où se concentre une vérité muette, convenable »
Lire un extrait de l’ouvrage…me mènerait à énoncer les noms de ces dignitaires engoncés :
KRUPS, OPEL, AGFA, SIEMENS, ALLIANZ, TELEFUNKEN… et la future VARTA…
Le livre nous dit que ces noms, parce que ce sont ceux de firmes actuelles, ceux du quotidien de notre consommation, sont ceux de « vieilles dames qui ne meurent jamais. »
Une autre vielle dame, est morte, ici et maintenant, et la marche est pour elle, les pieds de la foule sonnent, eux, un autre éveil, face au jeune couteau qui l’a lacérée, ils disent « l’oie non plus ne meurt jamais », elle était menacée.
Elle était de notre quartier, nous étions sourds à sa plainte, certains de notre République.
Résonne dans la rue, la multitude silencieuse par l’alerte des consciences et des larmes…puisqu’elle, elle est vraiment morte et son nom, lui, est perpétuellement anonyme, fondu dans la masse des disparus sans trace, couchés sur la liste des stèles de l’histoire d’une époque qui a précédé notre enfance.
C’était le temps de « l’après », celui des conversations des adultes, qui font que ces coups seraient aux enfants à leur table qui les entendaient, oubliés ou éternellement incompréhensibles .
Nous avons marché, nous tous, assis à ce buffet, sidérés, car nous disons cet éveil du soir, après une conscience tranquille, qu’un repos avait endormie, fugacement éveillés dans nos souvenirs rouges des Mai d’autrefois, il n’en reste que le désarroi d’une génération qui n’a pas su comprendre et le vrai et l’ivraie.