L’enfermement
L’enfermement
maman
l’enfermement
Essaie le paradis
mon fils
essaie le paradis
Perdu le paradis
maman
perdu
Tu perds toujours
mon fils
tu perds toujours
Je le sais
maman
je le sais
Et les nuits aussi
mon fils
les nuits aussi
Et tout ça qui hurle
au dedans
maman
tout ça qui hurle
Au dedans de moi
mon fils
au-dedans de moi
Ça hurle aux abois
maman
ça hurle aux abois
Aux abois
ça hurle
mon fils
aux abois de moi
Ça ne passe pas
maman
ça ne passe pas
Ça ne peut pas passer
mon fils
ça ne peut pas
Ça ne passera jamais
maman
ça ne passera jamais
Tu le sais maintenant
mon fils
tu le sais
ça ne passera jamais
*
Jusqu’au dernier
Venu de nulle part
Il est solitaire
Ou flanqué
D’un adjectif
Qui le qualifie
Souvent il hésite
À franchir le pas
Et à se dire
À l’extérieur
Ou à s’écrire
Sur la page
Seul
Ou en compagnie
D’autres mots
Qui hésitent
Eux aussi
À franchir le pas.
Il sait qu’il sera
Lu
Ou
Entendu
Par les autres
Ceux de l’extérieur
Il le sait
Ou feint de l’ignorer
Pour mieux se protéger
De leur regard
Dont il ne sait s’il seront
Bienveillants
hostiles
Ou – ce qui lui paraît le pire –
Indifférents.
Ce passage de l’intérieur
Vers l’extérieur
Est un espace transitionnel
Qui nous oblige.
Tout comme le passage de l’extérieur
Vers l’intérieur est un espace
Qui nous oblige à composer avec les autres
La partition de la comédie humaine
Avec ses pleins, ses déliés, ses silences,
Bref à célébrer tous les passages… jusqu’au dernier.