Un matin                                                                                            

où en  proie à des spéculations obliques                                      

je jouais une scène dramatique                                                   

en cheminant de biais

devant la ferme (1) du plateau

peinte aux couleurs du crépuscule

un Coq

du haut de son perchoir

me traita tout de go

d’intellectuelle de gauche 

Le clairon de sa gorge et le rouge de sa crête

pénétrèrent si profond dans ma chair

que jusqu’à la fin de son cours de théâtre

rendue muette

je m’appliquais à déambuler de gauche à droite

pour parvenir à entrer dans mon corps

Et là

tapis à l’intérieur je sens

une espèce de croupion proéminent 

un cou de canard et des pattes plates

prémisses d’un clown à costume trop large

jupe culotte où sexe hésite à prendre son parti

chemise bouffante voilant poitrine d’éternelle adolescente

dandinement et nez rouge de bécasse

qui croit aux bobards des puissants

et s’exprime dans la langue des dindons

Fini de s’adonner àux introspections psychologiques

ou à l’étude laborieuse d’incunables

au fond de bibliothèques poussiéreuses

feu l’intellectuelle devait dorénavant

sur les champs de foire d’ici et d’ailleurs

vivre de ses bides qui mettent les tripes à l’air

pour faire résonner ce gloussement caractéristique

d’un public qui se moque de ses travers

C’est ainsi que Le Coq

accoucha d’un canard

qui cancanait sur les tréteaux

pour béqueter ses drames

Merci donc à Maître Coq

de m’avoir hébergée dans son poulailler

et de m’avoir dit à la fin de ma formation:

qui sait

peut-être qu’un jour

vous écrirez ?

(1) Décor de théâtre monté sur châssis qui se détache de la toile de fond ou s’élève des dessous par des trappes

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