Elle prépara donc une nouvelle toile qu’elle punaisa directement sur le
mur après avoir poussé la toile inachevée sur le côté. Dès que la couche
de peinture blanche fut sèche, elle s’appliqua à faire jaillir des gerbes de
couleur alternant le jaune vif et les bleus radieux, parfois striés de vert
tendre, par touches successives, dans un mouvement ascendant régulier
du bras droit, qui faisait danser la couleur sur le fond blanc. Une
chorégraphie sans complication, mais qui s’avérait efficace pour signifier
le jaillissement joyeux et simple de la vie, inspiré sans doute par un
champ de céréales sous un soleil d’été, mais le dépassant, tout aussi bien,
par son abstraction. Elle tenait le mouvement dans sa main et le
mouvement la tenait. C’était prodigieusement excitant de travailler ainsi,
sans l’entrave de la réflexion et de l’attente, en laissant advenir la
composition sous la seule poussée du geste qui s’imposait avec une
facilité déconcertante, à moins qu’il ne s’agisse d’une nécessité qui la
dépassait.

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