Puissance du rouge
Le dahlia rouge de septembre
capte dans l’aura
de la toile
la pincée vibrante du jour.
*
Parmi les graminées d’or,
les herbes folles,
les papillons,
respirent et volent
les coquelicots d’aujourd’hui
avec la même pudeur rougissante
et délicate
que ceux d’autrefois
peints par Monet,
dans le vent, les blés, les senteurs,
les robes blanches des femmes
et cet azur plein de nuages
cherchant un fugace avenir.
*
Le rouge Vallotton
c’est autre chose qu’un coussin,
une table,
un sofa,
ou une robe,
(même si ce sont ces choses-là)
c’est une immense tache
de violence, de passion,
de crime même
fixant la nudité du vif
et imposant sa force fatale.
Quelque chose rouge
fixe l’attention
mord
comme une poussée de fièvre
une vibration pareille à un ultra son
envahit la toile et ne cesse plus
d’emplir l’espace de sa force
magique.
*
J’ai en mémoire
les rouges fascinants
de Zao-Wu-Ki
dans lesquels il faut se perdre
il faut !
*
C’est un point de fixation
à quoi on n’échappe pas
dans la passion du peintre
ce rouge, fanion, drapeau, gilet, écharpe
comme un ralliement vibratoire,
le point d’orgue de l’ardeur,
la signature, comme une saignée
où vient se rendre la lumière
et claironner la vie,
dans sa cinglante nudité.
On dirait que le rouge
ici et là dans la peinture
a quelque secrète accointance
avec la révolte, la rébellion,
le pas de côté cru, sexuel, tourmenté
qui pulse comme un sang
la chair de la toile.
Et l’on pense à Gauguin
roulant de rouge des terres magnétiques
érogènes et brûlantes
À Signac diffractant le cramoisi du coucher
sur les pins du midi
Et à Nicolas de Staël dont le concert
sur fond atonal rouge remplit l’espace
de vertige et silence.
*
Rose de personne
tu es rouge à jamais
cueillant la vie.
Dominique Zinenberg, Vernon le 28 avril 2018.